Je pense donc je grimpe.

jeudi 26 juillet 2012

C. Progresser en alpinisme : 2 pattes, 3 pattes, 4 pattes et des glissades


Les façons de progresser en alpinisme sont variées.

Nous allons passer en revue les diverses possibilités, ainsi que les notions techniques liées.

2 pattes : l’encordement sur glaciers (enneigés ou non)


Une chute dans une crevasse peut très vite devenir dangereuse. Il faut donc l'arrêter le plus vite possible, le moyen le plus efficace reste de progresser corde tendue et de rester vigilant.

Avec une corde de rando Ø 8 mm longueur 30 m pour une cordée de deux.


Eventuellement quelques nœuds (queues de vache ou nœuds de huit) sur le brin de corde reliant les deux membres de la cordée pour favoriser le freinage sur la lèvre de la crevasse en cas de chute.

Ces nœuds peuvent aussi servir à la victime pour s’extraire de la crevasse.

Attention : ces nœuds peuvent entraver la manœuvre de mouflage.

Avec une corde de rando Ø 8 mm longueur 30 m pour une cordée de trois.


Idéalement les deux membres de la cordée situés aux extrémités devraient posséder une corde de rando dans leurs sacs.

Gestion de la corde


Progression sur un glacier peu crevassé ou neige ou mixte.

> Obstacles à franchir (crevasse, rimaye): rallonger
> Terrain délité (risque de chute de pierres): raccourcir
> Pour régler la tension, l'alpiniste qui dirige la cordée peu éventuellement prendre un ou deux petits anneaux bloqués par un tour mort
> La corde ne doit jamais toucher la neige.
> Un nœud auto-bloquant est posé sur la corde; il facilitera la mise en place du moufflage en cas d'accident


Progression sur un glacier très crevassé (encordement en "N")
> Pas d'anneaux de cordes portés à la main
> La corde est divisée en trois "tiers" : un tiers sur chaque alpiniste, le reste est tendu entre les deux.


3 pattes : vos jambes et un piolet


En montée et en traversée


En traversée, plate ou ascendante, on tourne les chaussures vers le bas pour que les deuxièmes paires de pointes mordent bien la glace et travaillent dans le bon sens.

Cette gymnastique est parfois dure pour les chevilles, mais elle seule permet de progresser assez naturellement en sécurité et sans trop se fatiguer et en préservant vos mollets de la fatigue.


On utilisera cette technique de cramponnage (dite dix pointes) pour toutes les montées et traversées dans des pentes moyennement raides (jusqu’à 45° environ).

Le corps est bien équilibré, tout l’effort est produit par les jambes : le piolet ne sert qu’à s’équilibrer.

Dans des pentes plus raides, on pourra progresser en pointes avant.


Si elle paraît plus sécurisante au premier abord, cette technique doit être utilisée avec discernement. D’abord, elle fatigue vite les mollets. Ensuite, seules quatre pointes mordent la glace : le risque de dérapage est donc plus grand, surtout si la glace est mauvaise.

Il faut bien veiller à tenir la chaussure horizontale afin que les quatre pointes avant mordent fermement la glace.


Où mettre votre piolet quand vous ne l’utilisez pas ?


Lorsqu'on n'utilise pas les crampons, ceux-ci doivent être placées de préférence à l'intérieur du sac dans une poche de toile forte ou plastifiée. Les piolets courts peuvent rester dans le sac, et les longs sont tenus à la main.

Quand il est nécessaire d'avoir les mains libres (ex: en terrain mixte), le piolet est enfilé dans la bretelle du sac: avec le pouce on éloigne la bretelle de l'épaule, on enfile la pointe du piolet entre l'épaule et la bretelle , on fait passer le manche du piolet sur l'épaule et on positionne celui-ci entre le sac et le dos, la lame derrière le cou et la panne à l'extérieur.


En descente


En général, on descend face à la pente, les crampons bien à plat et fermement plantés dans la glace.

Selon la raideur on utilisera son piolet comme une canne ou comme une rampe (ci-contre).

Cette technique n’est pas intuitive et est impressionnante au début : il faut impérativement s’y entraîner sur glacier en milieu sécurisé. Elle est dure pour les cuisses, mais avec l’habitude on peut se ménager dans moments de repos.




Tirer des longueurs



Au cours d’une course de neige facile ou peu difficile, on progressera en général à corde tendue, sans point d’assurance entre le premier et le second, et sans faire de relais.

Cependant, il peut arriver que l’on doive gravir une pente en bonne neige mais plus raide. Tirer des longueurs apporte alors un plus au niveau sécurité. C’est certes un peu plus lent que la progression corde tendue, mais avec un peu d’habitude on accélère grandement les opérations et on n’hésite plus à le faire quand on ne ‘sent pas’  la pente.

Lorsqu’on fait un relais sur la neige, on essaie de toujours s’arranger pour que le relais ne puisse subir aucun choc direct important, car on n’est jamais sûr à 100% de sa solidité. C’est la personne qui assure qui fera tampon entre celui qui chute et le relais pour solliciter ce dernier le moins possible et surtout le plus progressivement possible.

En cas de chute du premier, le second doit faire un assurage dynamique. En effet, s’il bloque la corde autour de ses épaules, le choc sera tellement violent qu’il sera projeté dans la pente, et l’ancrage sur son piolet ne résistera probablement pas au choc. En revanche, s’il laisse filer un peu de corde, puis referme doucement ses bras pour accentuer progressivement le freinage, il a davantage de chance de pouvoir enrayer la glissade du premier.

En principe, si le second chute, il n’y a pas de choc puisque le premier doit l’assurer à corde tendue. Le relais n’est donc pas sollicité en cas de chute, sauf si le premier glisse.

C’est pourquoi, quand on se vache sur son piolet dans une pente de neige, la corde qui nous relie au piolet doit être tendue. Ainsi, si on glisse, il n’y a pas de choc et le piolet à toutes les chances de tenir bon.

Une fois que le premier à fait monter son second, deux possibilités :

Le premier veut faire la longueur suivante en tête. Dans ce cas le second se vache, et on recommence...

Vous préférez grimper en réversible ? Dans ce cas, il n’y quasiment rien à faire : le premier est déjà prêt à assurer son second... qui devient le premier pour la longueur suivante


4 pattes : deux jambes et deux piolets



On garde les mêmes et l’on recommence, avec toutefois une technique du piolet qui s’apprendra sur le terrain, avec un guide.




Pour redescendre, rien de ne vaut le ski.

On ne va pas s’étendre sur le sujet, juste faire un focus sur un élément essentiel : le réglage des fixations de ski de rando.

Une fixation n’est pas un instrument de mesure : les graduations sur la fixation sont sensées correspondre au poids du skieur : c’est évidement très approximatif.

Leur dureté réelle de déclenchement dépend du modèle, du réglage mais aussi, du graissage, de l’usure, de la température (gel) et du type de chaussure et de la façon dont on sollicite la fixation (frontale, torsion ou combinée).


Chaussures de ski de randonnée + fixations de piste = massacre



Les chaussures de ski de rando ont une semelle courbe et adhérente (Vibram(R)) : en cas de chute combinée, la semelle adhère sur le ski et augmente la force de déclenchement.

Les bonnes fixations de randonnée sont prévues pour atténuer ce problème (il en existe de mauvaises !) :
> soit un dispositif (plaque ou bande lubrifiée) permet à la semelle Vibram de glisser sur la fixation pendant un déclenchement en torsion
> soit le déclenchement en torsion se fait par l’arrière (Silvretta(R)).
Le corps humain n’est pas si simple
La robustesse d’une jambe dépend du poids mais aussi de :
> la technique du skieur,
> son état général, (âge, sexe, entraînement, santé)
> sa fatigue, sa concentration
> sa charge (sac à dos)
aussi, bien entendu, que de l’état de la neige.

La solidité des os évolue lentement au cours de la vie mais celle des tendons et ligaments est très variable.


Prenez vos responsabilités



Les réglages faits par les loueurs ou vendeurs de ski ne sont pas fiables:
> parce qu’ils sont bien souvent faits au " pifomètre " ou bien pas faits du tout.
> parce que le taux de risque envisageable quand on règle des skis pour la piste (neige damée, secours à proximité) est redoutable quand on affronte la montagne sauvage. Deux cas de réglage selon le terrain


Cas général : la neige molle



A ski de randonnée, tout au moins dans les Pyrénées que je connais le mieux, la neige est toujours variable et dans 80% des cas molle, croûtée, soupe, chaotique (ancienne coulées).

Avec un peu de chance, on aura le plaisir de se faufiler dans la poudreuse.

Dans toutes ces neiges, les fixations doivent déclencher facilement (y compris en cas de chute "à l’arrêt"). Un déclenchement intempestif pourra être fatiguant mais ça s’arrête là.


Ski extrême, glace



La neige gelée, la glace, le "béton ", des pentes raides et exposées : cela arrive par périodes ou par endroits. Alors les fixations sont soumises à de violentes vibrations et il est préférable qu’elles ne déclenchent pas car le danger est ici de dévaler la pente…

Dans ce cas :
> soit resserrez les fixations à fond : vous n’avez plus le droit à l’erreur.
> soit adoptez crampons-piolet, ce n’est pas déshonorant.

Dès le retour sur neige ordinaire, re-réglez normalement.


Méthode pratique et fiable de réglage des fixations



Commencer par régler la longueur des fixations pour les chaussures (certains l’oublient, si, si !). Chausser les skis sur terrain plat. Tester un ski à la fois. Desserrer les fixations (en général dévisser = sens inverse des aiguilles de la montre) jusqu’aux résultats suivants :
> Chute avant: Tirer sur la jambe (légèrement fléchie) d’un coup sec : ça doit déclencher sans douleur.
> Torsion:  Bloquer le ski en rotation (contre un bâton par exemple). Tourner la jambe d’un coup sec : ça doit déclencher sans douleur (ne pas taper sur la chaussure : ça n’a aucun sens).
> Chute combinée:  Résulte des 2 réglages précédents et de la qualité des fixations (voir "Vibram"). Penser que les articulations souffriront plus lors d’une chute combinée que lors d’une torsion ou d’une chute avant.

Le résultat de ces opérations est un réglage tout à fait correct qui tient compte de votre état physique et est adapté aux neiges autres que "béton". Il n’est pas interdit de régler encore plus doux. Si avec ce réglage vous déclenchez trop souvent, avant de resserrer, demandez vous si vous ne faites pas des fautes techniques de ski … il vaut mieux apprendre à mieux skier que de devoir réapprendre à marcher.


Règle de sécurité collective



Il est aujourd’hui d’usage de porter un ARVA et de le tester à chaque départ d’un groupe de skieurs. De même, il est souhaitable qu’à chaque départ à ski de randonnée les participants fassent le contrôle du bon réglage de leurs fixations en les déclenchant comme il a été expliqué ici.


Sources



Les écrits de Yves SALIBA 2000,2005.
http://rabere.com/0CAFColmar/EcoleDeGlaceCAFColmar.pdf
http://club.ffme.fr

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