Qu’est-ce que le mouflage en alpinisme?
Cette technique est différente des précédentes sur corde fixe : elle permet la remontée d'un compagnon de cordée dans une situation difficile, par exemple une chute de crevasse. Le principe est de créer une démultiplication à l'aide de mousquetons voire de poulies.
Installation d’un mouflage
Dans le cas d'une cordée de deux s'apprêtant à réaliser une course de neige du genre voie normale du Mont Blanc ou rando à skis, le matériel idéal sera une corde de trente mètres Ø 8 mm dont deux écheveaux de dix mètres seront répartis dans chacun des sacs.
Pour s'encorder, proscrire le mousqueton, même à vis, directement sur le baudrier. Utiliser plutôt un bout de corde Ø 9 mm, passé dans les boucles d'attache du baudrier et refermé par un double noeud de pêcheur. Relier cet anneau avec un mousqueton de sécurité à la corde d'attache à laquelle on aura fait une petite boucle à l'aide d'un noeud en huit. Cet anneau de corde peut être remplacé par un anneau de sangle cousue fixé au baudrier avec une tête d’alouette.
Avec une grande cordelette Ø 6 mm, faire un grand anneau pratiquement de la taille de l'alpiniste (le pied dans l'anneau, son autre extrémité doit arriver au front). Avec cette cordelette faire un noeud auto-bloquant (prussik ou machard) sur la corde d'attache, la asser à l'intérieur de la ceinture du baudrier (de haut en bas), et la bourrer dans une poche. Ainsi vous avez une pédale prête à l'emploi, notamment pour vous soulager si vous êtes pendu dans une position désagréable (particulièrement les messieurs dont le cuissard aura été bricolé à la hâte...).
Autres accessoires, deux autres anneaux de cordelette Ø 6 mm mais beaucoup plus petits (environ 60 cm) dans une autre poche ou sur le torse, trois mousquetons accrochés à une sangle en bandoulière et éventuellement une broche à glace, peut-être plus dangereuse qu'utile, en cas de chute, les crevasses sur glacier déneigé étant parfaitement visibles. Tout cela bien sûr pour chaque membre de la cordée, la fatalité ne choisissant pas ses victimes en fonction de leur qualité technique.
Un des deux petits anneaux peut aussi être fixé à la corde d’attache à l’aide d’un prussik placé entre le prussik de la grande cordelette et le nœud d’attache sur le baudrier. L’autre extrémité est passée dans le mousqueton d’attache. Le système d’auto-sauvetage est ainsi prêt à l’emploi.
Il est élémentaire de marcher à corde tendue, mais aussi sans anneau dans la main. Chaque anneau représente autant de mètres de chute en plus dans la crevasse et peut occasionner une blessure bien douloureuse en faisant une cravate autour des doigts. Pour franchir un pont de neige suspect, le second doit accorder son pas au déplacement, dans ce cas en principe lent, du premier de cordée mais surtout ne pas le rejoindre pour faire un mauvais assurage à l'épaule.
Pas de panique
Un des membres de la cordée a préféré visiter le glacier en profondeur. Ce n'est pas un drame. La corde, en cisaillant le rebord de la crevasse a amorti le choc et, à moins d'être sans crampons sur une neige particulièrement dure et lustrée, (je préfère ne pas imaginer la suite), l'alpiniste resté en surface n'a pas trop de difficulté à retenir son compagnon.
En surface, faire un bon amarrage à l'aide du piolet. Si la consistance de la neige est normale, il suffit de planter le piolet, en l'inclinant légèrement de manière à ce qu'il ne se fasse pas arracher par la corde. L'enfoncer jusqu'à la garde, quitte à lui asséner des grands coups de talon. Taper dans l'axe pour ne pas risquer de casser le manche !
On peut aussi planter deux skis en croix dans de la neige consistante et fixer une sangle (ou cordelette) sur le croisement des skis (au ras du sol).
Par contre, si la neige est vraiment pourrie, faire une trachée en forme de T, la barre supérieure du T étant perpendiculaire à la corde. Y coucher le piolet, une sangle fixée par une tête d'alouette sur le milieu de son manche et faire passer cette sangle par l'autre tranchée (le pied du T). Bourrer de neige et tasser. Si la neige est poudreuse, faire un corps mort avec un sac à dos par exemple ou en raid avec une paire de skis.
Enfouir le tout dans un trou, reboucher et faire partir l'amarrage dans une tranchée de manière à ce que la corde tire le plus horizontalement possible sur le corps mort.
En profondeur, remettez-vous de cette(désagréable) surprise, reprenez vos esprits et surtout organisez-vous de manière à ne rien laisser échapper de vos mains (piolet, si ce n'est déjà fait, sac à dos, quincaillerie, bâtons de ski, appareil photo, s'il est en bandoulière). Libérer la réserve de corde pour se délester de son matériel (sac, skis, etc.). La remontée sur corde sera moins pénible. Si vous avez les skis aux pieds enlever les et fixer les à la réserve de corde avec une cordelette passée dans les trous des skis (en spatule ou au talon … d’où l’intérêt des skis de rando …).
Sortez votre cordelette de la poche (la grande dont l’autre extrémité est déjà fixée sur la corde d’attache par un noeud de prussik), installez votre pied dedans et éventuellement, soulagez votre encordement s'il n'est pas très confortable. S'il n'est pas déjà en place, installer un autre autobloquant en-dessous du précédent sur la corde qui remonte pour y transférer son poids (noeud autobloquant, Tibloc, Minitraxion). Si vous ne parvenez pas à communiquer avec la surface, ne paniquez pas, le son passe très mal et parfois pas du tout. Sauf en cas de force majeure (crevasse très étroite dans laquelle vous sentez votre corps déjà coincé s'enfoncer entre la glace en la chauffant), attendez des nouvelles de votre compagnon avant de gesticuler au bout de votre corde. Vous risquez de donner des secousses qui vont le gêner dans l'installation de l'amarrage.
Maintenant revenons en surface. L'amarrage est prêt. Il se termine par une sangle à laquelle on fixe un mousqueton. La corde d'attache est trop tendue pour la fixer directement et c'est là qu'intervient notre grande cordelette et son noeud auto-bloquant déjà en place sur la corde. Le faire glisser le plus loin possible, c'est-à-dire à bout de bras, passez-en les deux brins dans le mousqueton, faites un demi-cabestan arrêté par un nœud de mule (ou noeud de ganse). C'est le genre de nœud que l'on fait pour lacer ses chaussures. Il suffit de tirer sur le brin libre pour le défaire. Assurez la boucle de ce noeud de mule en la crochetant dans le mousqueton, ou en faisant un noeud d'arrêt.
Maintenant revenons en surface. L'amarrage est prêt. Il se termine par une sangle à laquelle on fixe un mousqueton. La corde d'attache est trop tendue pour la fixer directement et c'est là qu'intervient notre grande cordelette et son noeud auto-bloquant déjà en place sur la corde. Le faire glisser le plus loin possible, c'est-à-dire à bout de bras, passez-en les deux brins dans le mousqueton, faites un demi-cabestan arrêté par un nœud de mule (ou noeud de ganse). C'est le genre de nœud que l'on fait pour lacer ses chaussures. Il suffit de tirer sur le brin libre pour le défaire. Assurez la boucle de ce noeud de mule en la crochetant dans le mousqueton, ou en faisant un noeud d'arrêt.
S'avancer lentement pour passer le relais de la tension à l'amarrage. La corde se détend entre le noeud auto-bloquant et l'attache et il est désormais possible de se décorder.
Prendre la sage précaution de s'auto-assurer en faisant avec l'autre cordelette un auto-bloquant qui coulissera le long de la corde au gré de vos déplacements. Une crevasse pouvant en cacher une autre et le fait d'avoir à s'approcher du trou laissé par le compagnon, sont des raisons suffisantes pour ne pas faire du solo.
Maintenant que les deux protagonistes sont à portée de voix, schématiquement, trois situations détermineront le choix de trois solutions.
La victime est en pleine forme. Elle peut remonter sur ses deux noeuds auto-bloquants. L'un, déjà installé pour un pied, l'autre sera mousquetonné sur son baudrier. Tantôt, il se hissera sur l'un, tantôt il se laissera aller sur l'autre et fera coulisser le nœud libre d'une trentaine de centimètres et ainsi de suite. Dans ce cas, l'homme en surface n'aura qu'à retourner à l'amarrage pour le contre-assurer et éventuellement aider son compagnon pour franchir la lèvre de la crevasse.
Autre possibilité : utiliser l'écheveau de corde en réserve dans le sac de l'homme de surface. Faire une boucle à son extrémité pour envoyer à la victime.
Celle-ci passera un pied dedans, se hissera de quelques dizaines de centimètres. L'alpiniste qui reste en surface avalera la corde d'assurance sur le nœud auto-bloquant de l'amarrage et la victime pourra se reposer à nouveau sur la corde d'assurance. La boucle, ainsi soulagée pourra être remontée pour la prochaine enjambée, puis bloquée par un autre noeud (ou autre dispositif de blocage : Minitraxion, Tibloc, Basic, …) sur la sangle de l'amarrage.
La victime est consciente mais, pour une raison quelconque, pas très opérationnelle.
Si la réserve de corde (encore ce fameux écheveau) est suffisante pour être envoyée en double à la victime, lui faire parvenir cette boucle équipée d'un mousqueton qui coulisse librement comme une poulie (ou d’une poulie avec mousqueton).
La victime passe donc ce mousqueton dans son attache et on réalise ainsi un mouflage de fond.
La victime peut aider son sauveteur en tirant sur le bon brin et de plus les frottements ne sont pas très importants (le sauveteur étant sur le bord de la crevasse, la corde glisse assez librement sur le rebord). Prévoir cependant un nœud auto-bloquant entre le brin que l'on remonte et l'un des deux autres.
Enfin, dernier cas, il y a panne de son dans la crevasse. La victime est KO. Il va falloir agir seul et confectionner un mouflage de surface. C'est encore l'écheveau de réserve qui va nous fournir la corde nécessaire à sa réalisation. Vu les frottements en présence, le mouflage simple est rarement performant, il doit être amélioré par un mouflage secondaire qui utilise la grande cordelette. Mais auparavant, il est nécessaire de la récupérer pour pouvoir en disposer. Commencer par installer un autre nœud auto-bloquant sur la corde d'attache, le plus près possible du mousqueton de l'amarrage, le fixer à ce dernier par un noeud en huit, défaire le noeud de mule et descendre quelque peu la victime sur le demi cabestan de la grande cordelette, la petite cordelette se met en tension et prend le relais de la grande qui peut ainsi être récupérée.
On peut alors installer un mouflage avec démultiplication en fonction du matériel dont on dispose.
D’autres dispositifs de mouflage (Mintraxion, Tibloc, Basic, …) rendent ces opérations plus aisées.
Exemples :
Mouflages de Fond
En résumé
Les valeurs renseignées dans le tableau ci-dessous sont basées sur l’utilisation de poulies et du piolet évitant l’incrustation de la corde dans la lèvre de la crevasse.
S'entraîner
En guise de conclusion, ajoutons que l'exécution de ces manoeuvres ne peut être efficace que grâce à la connaissance parfaite des noeuds. En effet, ce n'est pas quand un vent de panique souffle dans le même sens que la tempête (un ennui n'arrivant jamais seul) qu'on arrive à redécouvrir un nœud !
D'autre part, l'entraînement n'étant pas incompatible avec l'expérience des montagnards, il peut être intéressant, un jour où le temps est trop incertain pour partir en course, de remplacer une longue partie de belote en refuge par des exercices de sauvetage sur le glacier le plus proche. Dans ce cas, éviter les crevasses dont les lèvres forment des corniches importantes. En effet, la chute d'une de celles-ci sur une pseudo-victime pourrait avoir des conséquences tout à fait fâcheuses. Enfin, la présence en surface d'une équipe de gros bras peut résoudre efficacement une "panne de mouflage". D’où l’avantage au niveau sécurité de la cordée de trois (ou de deux cordées de deux alpinistes).
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